Titre: Livre Blanc sur la Défense, 1994 - Chapitre sixième

CHAPITRE SIXIÈME: CONTRIBUTION À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE
Les Canadiens sont, par nature, internationalistes; ils ne sont pas isolationnistes. Nous sommes les héritiers d'une remarquable tradition de service à l'étranger, et fiers du prix Nobel de la paix décerné à Lester Pearson. Au-delà de l'insigne honneur qu'il rendait à ce grand Canadien, il marquait aussi la reconnaissance de la nouvelle personnalité de notre pays sur la scène internationale. Trente ans plus tard, les Canadiens ont eu de nouveau l'occasion de s'enorgueillir de leur contribution à la cause de la paix, lorsque le prix Nobel est venu saluer l'oeuvre des soldats de la paix. La coopération multilatérale pour la sécurité n'est pas seulement une tradition pour le Canada, c'est aussi l'expression de ses valeurs à l'échelle internationale. Ce qui se passe à l'étranger ne nous est pas indifférent et nous sommes disposés à collaborer avec d'autres pays afin d'améliorer le sort des peuples, quels qu'ils soient.
Par ailleurs, les Canadiens ne sont pas sourds aux leçons de l'histoire. Certes, nos concitoyens comprennent que les États aient tendance à préférer consacrer leurs ressources à leurs grandes questions nationales de l'heure, mais l'expérience qu'ils ont des deux guerres mondiales et de la guerre de Corée leur confère une résistance à la tentation des temps de paix de croire leur sécurité garantie, tentation qu'engendre une tendance à prendre ses désirs pour des réalités. Pour le Canada, il est clair aussi que le passé met en relief la nécessité d'établir et de maintenir des institutions multilatérales véritablement en mesure d'assurer la sécurité et la stabilité, et de réagir énergiquement aux agressions lorsque rien d'autre n'y suffit.
Les valeurs et les intérêts du Canada sont désormais d'ordre mondial, et ses forces armées se doivent de contribuer à la sécurité internationale. Il convient que nous continuions de jouer un rôle actif au plan militaire au sein des Nations unies, de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord et de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe. Il faut aussi que nous élargissions nos relations de défense avec les pays de la région Asie-Pacifique et d'Amérique latine et, dans la mesure du possible, que nous fassions davantage pour la sécurité au Moyen-Orient et en Afrique.
La communauté internationale se heurte aujourd'hui à des problèmes de sécurité d'une complexité qui défie les solutions toutes faites, et elle tient à les régler dans le cadre d'institutions multilatérales. Cela ne tient pas seulement aux récentes améliorations des relations mondiales, mais au fait qu'à une époque où bon nombre de pays réduisent leurs dépenses militaires en vue de financer leurs grands projets nationaux, la coopération multilatérale est une bonne façon de mettre en commun les ressources de chacun et d'en tirer le meilleur parti. De toute évidence, donc, aujourd'hui plus que jamais, les solutions multinationales ont besoin de notre appui et, par-delà les bonnes paroles et les idées, méritent que nous prenions en leur faveur des mesures tangibles pour conforter la sécurité et le bien-être du monde.
Opérations multilatérales: la perspective canadienne
La nature des opérations des Nations unies a considérablement changé ces dernières années. Par le passé, en effet, elles consistaient avant tout en des missions traditionnelles de maintien de la paix et d'observation. Leur gamme s'est nettement élargie et couvre à présent l'ensemble des activités militaires, des déploiements préventifs aux actions d'imposition de la paix, comme la guerre du Golfe. Tout cela est fort bien documenté dans l'Agenda pour la paix de 1993, du Secrétaire général de l'ONU.
L'évolution progressive des opérations d'appui aux objectifs de l'ONU ne s'est pas traduite que par des succès. Certes, un certain nombre de missions ont été de grandes réussites, notamment celle du Groupe d'assistance des Nations unies qui a facilité la transition de la Namibie vers l'indépendance. D'autre part, l'opération multinationale déclenchée dans le Golfe en 1990-1991, à la suite de l'invasion du Koweït par l'Irak a permis d'imposer les sanctions économiques décrétées contre l'Irak et, lorsqu'il fut clair que ces sanctions ne suffiraient pas à convaincre les Irakiens de se conformer aux résolutions de l'ONU, de restaurer la souveraineté du Koweït au terme d'une campagne militaire aussi brève qu'efficace.
On a cependant aussi enregistré de profondes déceptions. L'opération des Nations unies en Somalie avait été conçue à l'origine avec la plus grande générosité et les meilleures intentions pour rétablir l'ordre, dispenser des secours humanitaires désespérément attendus et faciliter la reconstruction nationale. Il semble évident, à son terme, qu'au moins deux de ses trois objectifs n'ont pas été atteints. De même, s'il est indéniable que les opérations de l'ONU dans l'ex-Yougoslavie ont permis de sauver des vies, elles ont également bien mis en lumière le problème des missions dont le mandat évolue sans cesse. Elles ont en outre souligné les difficultés que soulève la mise au service de l'ONU des ressources d'organisations régionales comme l'OTAN et l'Union européenne. Ailleurs, au Rwanda par exemple, les Nations unies ont été tout simplement incapables d'intervenir à temps.
Le Canada, qui a toujours nettement favorisé le multilatéralisme en général, et l'ONU en particulier, a joué un rôle important dans le cadre de la récente vague d'opérations des Nations unies. Il restera l'ardent défenseur des institutions de sécurité multilatérales. Nous sommes, cependant, également convaincus qu'il convient à présent de situer les objectifs et la conduite des missions multilatérales pour la paix et la stabilité dans une perspective réaliste. Il faut pour cela tenir compte de considérations qui valent pour toutes les opérations de ce genre, de même que d'autres qui concernent plus précisément les organismes multilatéraux de sécurité comme l'ONU et l'OTAN.
Considérations générales.
La considérable expérience du Canada en matière d'opérations multilatérales nous a permis d'identifier, dans les objectifs, la conception et le déroulement des missions, certaines caractéristiques prometteuses de succès. Ainsi, il est préférable que ces missions visent à contrer de réelles menaces à la paix et à la sécurité mondiales (cas du Golfe et de l'ex-Yougoslavie) ou à prévenir des catastrophes d'ordre humanitaire (cas de la Somalie et du Rwanda). Il ne faut pas que l'action entreprise devienne une action en soi. Et puis, il vaut mieux que les opérations s'inscrivent dans une stratégie d'ensemble dont le but est de trouver des solutions à long terme, à la fois réalistes et viables (cas des opérations de l'ONU en Amérique centrale).
Il convient donc que certains principes clés président à la conception de toute mission:
- un mandat précis et traduisible dans la réalité;
- une autorité responsable bien identifiée et acceptée de tous;
- une composition nationale des forces militaires adaptée aux besoins de la mission, et un processus de consultation efficace entre les pays participant à la mission;
- dans le cas de missions faisant appel à des ressources militaires et civiles, une autorité responsable sur le terrain clairement désignée, une répartition précise des compétences par souci d'efficacité, et des modalités de mise en oeuvre communément acceptées.
- Sauf en cas d'opérations d'imposition de la paix ou d'interventions en vue de défendre des États membres de l'OTAN, la participation canadienne doit être acceptable par toutes les parties au conflit.
L'expérience que le Canada a acquise, notamment dans le cadre de ses opérations multilatérales, que ce soit ou non dans le cadre de l'ONU et de l'OTAN, nous porte en outre àcroire qu'un certain nombre de conditions fondamentales d'ordre opérationnel influe aussi largement sur la probabilité de succès des missions. En particulier, il importe:
- que du début à la fin d'une opération, les contingents militaires qui lui sont assignés conviennent à la mission par leur importance et leur formation autant que par leur matériel; et
- que le concept d'opérations soit bien défini, la structure de commandement et de contrôle efficace, et les règles d'engagement parfaitement claires.
L'ONU et l'OTAN.
C'est à la lumière de l'expérience pratique qu'a le Canada des opérations multilatérales, que le gouvernement a développé son point de vue sur les principes à suivre en matière de répartition des rôles entre l'ONU et l'OTAN, les deux plus importants organismes de sécurité auxquels appartient le Canada, en matière d'opérations multilatérales. Si le Canada fait depuis longtemps partie de ces deux organisations, c'est qu'il y voit des institutions qui ont beaucoup à offrir du point de vue de la paix et de la stabilité internationales. Cela dit, l'une et l'autre ont leurs points forts, leurs lacunes et leurs limites.
Par le passé, l'ONU n'a que très rarement réussi à atteindre le degré de consensus nécessaire pour intervenir militairement. De ce fait, elle ne dispose ni du personnel ni de l'expérience nécessaires, pour concevoir une opération ou préparer les forces multinationales qui lui permettraient de mettre en oeuvre le potentiel militaire de ses États membres dans les meilleures conditions au plan des délais et de l'issue de la mission. En fait, chaque fois qu'elle entreprend une mission, pour que l'ONU dispose du moindre soldat, il faut encore que les États membres soient disposés à en mettre àsa disposition.
La raison d'être de l'OTAN est plus étroitement définie. L'Alliance a pour mission d'assurer la défense collective de ses États membres. Le nombre de ceux-ci se limite à 16 pays aux vues similaires, et il est donc plus facile de parvenir à un consensus. L'Alliance a par ailleurs beaucoup d'expérience dans l'organisation et la préparation de forces multinationales en vue de missions défensives, ainsi qu'en matière de planification et d'exécution d'opérations interalliées. Qui plus est, l'engagement des États membres à participer à la défense d'un pays de l'Alliance est quasi automatique.
Le Canada est acquis au principe d'une Organisation des Nations unies vigoureuse et efficace, capable de défendre les valeurs et les procédures consignées dans sa Charte. Pour le Canada, les situations exigeant une intervention militaire internationale doivent être traitées conformément aux dispositions de la Charte. L'ONU est en droit d'employer la force en vertu, d'une part, de l'autorité prééminente que lui confère sa représentativité à l'échelle mondiale et, d'autre part, de sa Charte, qui fixe le cadre éthique et légal actuel des relations entre les États, voire, dans certains cas, au sein même des États.
Il reste que l'ONU traverse de sérieuses difficultés. L'Organisation souffre, en particulier, d'une crise budgétaire chronique, à la fois parce que certains États membres ne respectent pas leurs obligations financières et du fait de plusieurs opérations récentes de très grande envergure, extrêmement complexes et coûteuses, qui ont grevé considérablement ses ressources. De plus, il faudra réformer le Conseil de sécurité si l'on veut qu'il soit vraiment utile à la communauté internationale. Il faut que l'on prête plus d'attention au texte de ses résolutions. Il est indispensable que son processus décisionnel gagne en transparence, et que les pays qui n'y siègent pas, tout particulièrement ceux dont les troupes participent à des opérations en cours, soient consultés de façon plus systématique. Enfin, au plan interne, l'ONU n'a pas réussi à assumer efficacement le rôle élargi qui est le sien depuis la fin de la guerre froide. Pour lui permettre de recouvrer sa crédibilité, il importe donc de réformer sa bureaucratie, de rationaliser son fonctionnement et de réduire ses coûts.
Il conviendrait que, une fois que l'ONU a établi ses objectifs, déterminé les moyens d'y parvenir et arrêté sa stratégie sur une question donnée, elle soit en mesure de passer aux actes sans délai et avec la promesse de résultats concrets. Il se peut que la constitution d'une force permanente des Nations unies puisse constituer une solution au problème auquel se heurte l'ONU depuis longtemps lorsqu'elle décide de lever des troupes immédiatement. Les modalités pratiques de l'établissement d'une telle force sont complexes, et le Canada est résolu à voir la question étudiée àfond. Entre-temps, nous augmenterons notre capacité de contribuer aux opérations de l'ONU, et, dans les limites de nos ressources, nous nous efforcerons de répondre rapidement aux appels de l'ONU, qu'il soit question de savoir-faire, de personnel ou d'unités de campagne au grand complet.
Le Canada demeure aussi très favorable à la réforme de l'OTAN, dont il souhaite voir le potentiel de compétences et de ressources militaires mis plus souvent au service de l'ONU. Or, elle n'y consentira que si ses rapports avec l'organisation mondiale sont définis en termes clairs et appropriés et sont bien compris de tous. La plus utile contribution que l'OTAN puisse apporter aux opérations de l'ONU serait de mettre à sa disposition la puissance militaire et l'énergie qui lui font défaut. Si elle accepte de jouer ce rôle, toutefois, il faudra que l'Alliance sache résister à la tentation d'imposer ses vues sur l'orientation politique et stratégique des missions. Cette responsabilité ne peut incomber qu'au Conseil de sécurité.
L'ONU, pour sa part, doit reconnaître que, lorsqu'elle demande à l'OTAN son soutien militaire, il faut que la chaîne de commandement et les procédures de l'Alliance puissent continuer de fonctionner, sans être compromises par des directives politiques ou militaires vagues, confuses ou discordantes. Ce genre d'instructions nuirait à l'efficacité opérationnelle de l'OTAN, ne favoriserait en rien la réalisation des objectifs de l'ONU et, en fin de compte, porterait atteinte à la crédibilité des deux organisations.
Considérations nationales.
Le Canada doit rester prêt à affecter des troupes à une large gamme de missions de l'ONU et d'autres opérations multilatérales. Certaines situations internationales susciteraient une intervention rapide du Canada, par exemple la nécessité de défendre un de nos alliés de l'OTAN ou une menace comparable contre la paix et la sécurité internationales. Cet engagement de caractère général est sans équivoque. Dans des circonstances moins extrêmes, toutefois, il est possible au Canada de se montrer sélectif - et il se devra de l'être s'il veut demeurer en mesure de jouer un rôle réel. Il ne lui est pas possible de participer à toutes les opérations multilatérales, et ce n'est d'ailleurs pas nécessaire. Nos ressources sont limitées; il se peut que nous ne soyons pas d'accord avec l'objet ou l'organisation de telle ou telle mission, ou que nous ne soyons pas convaincus de ses chances de succès, ou encore que nous soyons engagés ailleurs. De plus, rien n'oblige le Canada à toujours assumer une part importante de chaque opération ou à fournir des forces plus longtemps que cela semble souhaitable. Ce qui est certain, toutefois, c'est que le Canada entend maintenir sa spécialisation dans les opérations multilatérales et que nous affecterons des forces à ce genre de mission si nous disposons des ressources voulues et d'un personnel convenablement armé et entraîné pour les missions en question et donc en mesure de contribuer véritablement à leur succès.
Choix possibles
L'engagement du Canada vis-à-vis des opérations multilatérales est sans égal. Le plus frappant à ce sujet n'est d'ailleurs pas seulement le nombre de missions auxquelles ont participé les Forces canadiennes, mais aussi le fait que ces missions aient couvert pratiquement tout l'éventail des activités militaires. Sous réserve des principes énoncés précédemment, le gouvernement est prêt àengager des forces maritimes, terrestres et aériennes (ainsi que des éléments de soutien) dans toute la gamme des opérations multilatérales, y compris celles décrites ci-après.
Déploiements préventifs.
Les déploiements préventifs ont pour objectif de désamorcer une situation tendue entre des parties sur le point d'entrer en conflit, d'accroître leur degré de confiance mutuelle et d'éviter que des incidents sans importance ne dégénèrent, accidentellement, en conflit généralisé. Le gouvernement considère ce genre de déploiement comme fort utile, dans le cadre d'une stratégie diplomatique plus globale visant à résoudre un conflit par la voie pacifique et àprévenir le déclenchement d'hostilités. De fait, le Canada a participé dès le départ au tout premier déploiement préventif de forces de l'ONU, dans l'Ex-république yougoslave de Macédoine en 1993, dont le but était de stabiliser dans une certaine mesure cette région troublée des Balkans.
Missions de maintien de la paix et d'observation.
Les missions de maintien de la paix et d'observation représentent ce que l'on entend traditionnellement par maintien de la paix. Ces termes évoquent les missions dans le Golan ou à Chypre. Ces opérations consistent à interposer des forces impartiales entre les parties à un cessez-le-feu et à veiller au respect des pactes conclus pendant que se déroulent les négociations devant mener à une solution politique. Ces dernières années, ce genre d'opérations n'a pas bénéficié de la même visibilité dans le public que certaines autres missions multilatérales, dont celles de l'ONU en ex-Yougoslavie, en Somalie et au Cambodge. Néanmoins, quand la volonté existe de mettre fin à un conflit armé et de trouver un règlement politique, les missions de maintien de la paix traditionnelles restent un précieux instrument pour faciliter la transition. L'expérience du Canada en la matière est sans pareille, et le gouvernement a la ferme intention de maintenir la participation des Forces canadiennes à de telles opérations.
Imposition de la volonté de la communauté internationale et défense de l'Alliance.
Les opérations les plus ambitieuses entreprises ces derniers temps ont pris la forme d'interventions sous une égide multilatérale visant à faire respecter la volonté de la communauté internationale non seulement dans le contexte de guerres entre États, mais de conflits à l'intérieur de certains États. On compte parmi les exemples récents de telles opérations:
- l'imposition de sanctions économiques ou d'embargos sur les armes;
- le recours aux forces armées pour garantir la livraison de secours;
- les interdictions de vol lorsque des forces hostiles voulaient mettre à profit l'espace aérien pour mener une campagne militaire ou attaquer des populations civiles (cas des zones d'interdiction de vol);
- la protection de populations civiles et de réfugiés à l'intérieur de zones de sécurité; et
- la défense des États membres de l'ONU et de l'OTAN contre les menaces d'attaque ou en cas d'attaque.
Les Forces canadiennes ont pris part à des opérations de chacun de ces types . Pour ce faire, il leur a fallu pouvoir compter sur une formation poussée et des capacités très diversifiées. Nos militaires ont contribué à faire respecter les sanctions économiques décrétées contre Haïti et l'ex-Yougoslavie. Ils se sont employés à rétablir l'ordre et à assurer la livraison de secours humanitaires en Somalie. Dans le cadre de la FORPRONU, ils font de même en Croatie, en même temps qu'ils participent à l'interdiction des vols et à la protection de zones de sécurité en Bosnie-Herzégovine. En 1990-1991, le Canada s'est joint à la coalition multinationale qui devait repousser l'invasion du Koweït par l'Irak. Enfin, pendant toute cette période, les Forces canadiennes ont continué de s'entraîner avec nos alliés de l'OTAN afin que l'Alliance demeure capable de se défendre contre toute attaque armée.
La recrudescence des tensions ethniques et religieuses, le nombre accru d'États-faillite et la persistance des querelles de frontières et de celles que suscite l'accès à certaines ressources sont autant de raisons de penser qu'à moins de devenir multidimensionnelles, les interventions multilatérales seront vouées à l'échec face à la variété des défis à relever. Le but de ces missions est invariablement irrécusable, qu'il soit question de protéger des populations civiles et des réfugiés, de reconstruction nationale, de défense du droit international ou de résister à une agression. On aurait pourtant tort de croire qu'elles se dérouleront toujours sans heurts ou sans poser de risques importants au personnel des Forces canadiennes, tout particulièrement dans un contexte où la prolifération d'armements sophistiqués devient la règle plutôt que l'exception. Néanmoins, le Canada restera prêt à fournir des forces pour ces opérations, qu'elles soient placées sous l'égide de l'ONU ou de l'OTAN, ou encore de la CSCE.
Consolidation de la paix.
La formation, les compétences et le matériel de nos forces armées leur donnent les moyens de contribuer de façon importante à la sécurité du monde en participant à la réhabilitation des secteurs dévastés par la guerre. Elles ont en particulier, par le passé, apporté des secours humanitaires, reconstruit des infrastructures et procédé au nettoyage de zones minées. Une fois les troupes soviétiques retirées d'Afghanistan, le Canada a même pris l'initiative d'apprendre aux réfugiés à reconnaître les divers types de mines et à les désamorcer. Ce genre d'activités est d'une valeur inestimable pour l'établissement d'une paix durable, et le gouvernement envisagera des moyens de permettre aux Forces canadiennes d'en entreprendre de nouvelles.
Avant de former le gouvernement, nous avions déjà souligné le besoin d'étudier la question des rapports entre militaires et civils, dans le cadre des nouvelles missions multilatérales. Nous nous emploierons à dépasser les progrès réalisés jusqu'ici. Il apparaît, par exemple, à la lumière de l'expérience acquise lors de nos missions en Éthiopie, en Somalie et au Rwanda, que les forces armées ont un rôle crucial à jouer au tout début de ces missions, particulièrement dans l'établissement d'un cadre de sécurité et la fourniture d'un soutien élémentaire (transport, soins médicaux d'urgence, logistique et communications). À plus long terme, toutefois, il semble préférable de laisser aux organismes civils la responsabilité de relever le pays, qu'il s'agisse de l'appareil administratif ou judiciaire civil, des services de santé ou de secours humanitaires.
Mesures visant à accroître la stabilité et la confiance.
Le contrôle des armements et les mesures visant à instaurer la confiance constituent un important moyen de prévenir ou de limiter les conflits et de promouvoir des relations stables entre les États. Au cours des deux dernières années, par exemple, le Traité sur les forces conventionnelles en Europe a permis la destruction de plus de 7 000 chars des pays de l'ancien pacte de Varsovie, soit un nombre suffisant pour équiper 32 divisions de type soviétique.
Les capacités d'inspection et de vérification jouent un rôle déterminant dans le succès ou l'échec de ces accords. Le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes continueront de faire leur part d'opérations de ce genre, dans les limites de leurs ressources, comme ils l'ont fait dans le passé.
Les contacts multilatéraux et bilatéraux entre représentants civils et militaires de divers pays sont l'un des moyens les plus intéressants et les plus productifs de contribuer à accroître la stabilité et à instaurer la confiance. Ce genre de relations, qu'il s'agisse de brèves visites ou de véritables pourparlers et d'échanges de personnel, favorise la transparence et le respect mutuel du fait des rapports directs qu'elles permettent d'établir, et d'une plus juste perception des différences d'appréciation qui existent en matière de défense, ainsi que de tradition et de doctrine militaires. Les Forces canadiennes ont par le passé profité de contacts bilatéraux et multilatéraux de ce genre pour aborder les sujets les plus divers, de la planification de défense aux rapports entre civils et militaires. Les échanges avec les armées d'Europe centrale et orientale, ainsi qu'avec la Communauté des États indépendants se sont révélés fort prometteurs. Aussi, le gouvernement entend les étendre à d'autres pays. Nous augmenterons donc de façon substantielle le budget consacré au Programme d'aide àl'instruction militaire, afin de développer les contacts avec l'Europe centrale et orientale, la Communauté des États indépendants, l'Asie, l'Amérique latine et l'Afrique.
Formation aux missions multilatérales
Le gouvernement est convaincu que la meilleure façon de préparer les Forces canadiennes aux missions multilatérales est de les former au combat, à l'échelle nationale et aux côtés de nos alliés. Ainsi préparées, les Forces disposent des compétences nécessaires pour faire face à toutes sortes de situations inattendues susceptibles de se présenter dans des circonstances autres que la guerre.
Le Canada oeuvrera en faveur de l'amélioration de la formation au maintien de la paix.
- Les expériences vécues récemment lors d'opérations de l'ONU ont confirmé l'utilité de sensibiliser les soldats de la paix à la culture des pays où ils sont envoyés, et de leur donner des bases solides en matière de droit humanitaire international et de résolution de conflits. Bien que cette instruction ait toujours fait partie des préparatifs auxquels sont soumis les militaires canadiens, il lui sera accordé encore plus d'importance àl'avenir.
- Le gouvernement a beaucoup favorisé la création à Cornwallis, en Nouvelle-écosse, du Centre international canadien Lester B. Pearson pour la formation au maintien de la paix sous les auspices de l'Institut canadien des études stratégiques et contribué à son financement. Le Ministère y parrainera à l'avenir la formation dispensée dans le cadre du Programme d'aide à l'instruction militaire à l'intention du personnel militaire des pays du Partenariat pour la paix de l'OTAN et des nations en développement.
Institutions et engagements
Renforcement des Nations unies.
Le Canada, dont l'appui politique et financier aux Nations unies n'a jamais failli, continue de promouvoir la réforme de cette institution. Dans le domaine de la sécurité, il contribue aux opérations onusiennes en y apportant un personnel extrêmement qualifié, des ressources militaires importantes et une expérience considérable. Aux yeux d'autres pays, le Canada est à cet égard un chef de file. Outre ses excellents antécédents au chapitre du paiement de sa quote-part des opérations de l'ONU, notre pays s'est distingué en mettant un certain nombre de militaires riches d'une expérience éminemment utile au service des dirigeants de l'ONU, en vue d'améliorer leur capacité de planification et d'exécution. Le Canada continuera aussi de faire campagne pour l'amélioration des modalités de financement des opérations de l'ONU, la mise à jour de son système de commandement et de contrôle, et le développement de ses capacités administratives et logistiques.
Il fut un temps où la participation des Forces canadiennes aux opérations de maintien de la paix de l'ONU était plus ou moins plafonnée ou envisagée aux alentours de 2 000 personnes. L'expérience de ces dernières années suggère une approche plus souple. De façon générale, dans le cadre des missions de l'ONU, les Forces canadiennes se tiendront prêtes à déployer des forces d'intervention pouvant comprendre jusqu'à un groupe opérationnel maritime, un groupe brigade et un groupe bataillon d'infanterie ainsi qu'une escadre de chasseurs et un escadron d'aéronefs de transport tactique. Si toutes ces unités devaient se déployer simultanément, c'est quelque 10 000 militaires qui seraient mis à contribution.
Le Canada augmentera le nombre de ses troupes en réserve de l'ONU dans les limites précisées ci-dessus. Elles passeront de: un bataillon, un élément de transport aérien et un élément des communications à l'ensemble des éléments d'avant-garde des forces d'intervention, soit deux navires (un sur chaque côte), un groupement tactique, un groupe bataillon d'infanterie, un escadron de chasseurs, une escadrille de transport aérien tactique, un élément des communications et un élément de quartier général. Si tous ces éléments se déployaient simultanément, c'est environ 4 000 militaires qui seraient mis à contribution et dont il faudrait assurer le soutien par la suite aussi longtemps que nécessaire.
Les Forces canadiennes seront également en mesure de déployer pour des périodes limitées certains autres de leurs éléments, et en particulier, du personnel des services de santé, des unités de transport et des transmissions, ainsi que des sapeurs, dans le cadre de missions de secours humanitaires. Enfin, le Canada fournira également, dans la mesure du possible, des observateurs et des techniciens spécialisés.
OTAN: Participation et réforme.
Le Canada continuera de figurer parmi les membres actifs à part entière de l'OTAN. La menace monolithique qui pesait naguère sur l'Europe de l'Ouest a disparu et, pour le moment, c'est aux Européens que revient avant tout la responsabilité d'assurer la défense de l'Europe. Le gouvernement attache cependant une grande importance au lien transatlantique que constitue l'OTAN. Il reconnaît également que, depuis 1990, l'Alliance a su s'adapter au contexte de l'après-guerre froide. On n'a qu'à penser, pour s'en convaincre, aux remarquables résultats que représentent, du point de vue de la collaboration en matière de sécurité européenne, des initiatives comme la création du Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA), le Partenariat pour la paix et l'élaboration du concept de force opérationnelle combinée.
Le Canada militera en faveur de changements supplémentaires. Certes, le rôle fondamental de l'Alliance consiste à assurer la défense collective de ses membres. L'OTAN peut toutefois contribuer encore davantage à la sécurité collective et coopérative qu'elle ne le fait actuellement, et le gouvernement s'attachera à trouver un équilibre approprié entre la mission traditionnelle de l'Alliance et ses nouveaux rôles. Le Canada prendra une part active aux efforts que continue de déployer l'Alliance en direction des pays d'Europe centrale et de la Communauté des États indépendants. Nous sommes tout à fait favorables à l'expansion de l'OTAN, mais nous persistons à croire que cette question doit être abordée avec beaucoup de prudence, car il faut éviter que ce processus n'exacerbe les craintes de la Russie de se voir ainsi encerclée ou marginalisée. Le Canada participera donc aux programmes multilatéraux et bilatéraux destinés à intégrer progressivement tous nos partenaires du CCNA dans un dispositif de sécurité adapté aux besoins de l'hémisphère nord.
Enfin, le Canada insistera pour que l'Alliance gagne en efficacité dans la préparation de ses budgets et diminue ses frais de fonctionnement, comme ont dû le faire les ministères de la défense nationale des États membres, tous confrontés à d'importantes compressions budgétaires. Nous proposerons notamment que l'OTAN réduise l'importance et le coût de sa bureaucratie, et qu'elle veille à affecter son budget militaire à des activités vraiment utiles dans le nouveau contexte international.
Les engagements futurs du Canada envers l'OTAN refléteront la conception que le gouvernement se fait de l'Alliance. En cas de crise ou de guerre en Europe, les forces d'intervention que le Canada réserve à l'ensemble des missions multilatérales seraient immédiatement mises à la disposition de l'OTAN. Si cela devait s'avérer nécessaire, le Canada mobiliserait d'autres ressources nationales afin de pouvoir remplir ses engagements en vertu de l'article 5 du Traité de l'Atlantique Nord.
En plus de s'engager, de manière générale, à déployer des forces pour la défense du territoire de l'Alliance, le Canada conservera un certain nombre d'engagements particuliers en temps de paix. Il convient, de ce point de vue, de noter trois changements importants.
Premièrement, le Canada cessera d'assigner un groupe bataillon à la Force mobile terrestre du Commandement allié en Europe ou à la Force mixte de l'OTAN au titre de sa participation à la défense du nord de la Norvège. Compte tenu de l'évolution de la sécurité européenne et de l'actuelle posture stratégique de l'OTAN, il semble en effet que ce groupe bataillon jouerait un rôle plus utile dans le cadre d'une force d'action rapide de l'OTAN prête à se déployer n'importe où sur le territoire de l'Alliance, y compris en Norvège. Nous nous proposons donc d'affecter ce même groupe bataillon d'infanterie à la Force terrestre de réaction immédiate de l'OTAN. Le matériel du groupe bataillon, qui est actuellement prépositionné en Norvège et qui se prête tout particulièrement aux opérations dans le Nord, pourrait, dans ces conditions, être rapatrié et utilisé pour répondre aux besoins accrus des unités régulières de l'armée de terre, dont les effectifs sont en augmentation, ainsi qu'à ceux de la Milice.
Deuxièmement, parallèlement à sa contribution à la Force maritime permanente de l'OTAN dans l'Atlantique, le Canada attachera de temps à autre un navire à la Force navale permanente de l'OTAN en Méditerranée. Cette initiative, qui cadre avec le contexte géographique élargi de l'Alliance, améliorera encore la formation de notre personnel naval ainsi mis au contact de marines alliées.
Troisièmement, le Canada a toujours eu un solde nettement positif du point de vue de ses cotisations au Programme d'infrastructure de l'OTAN dont le but était de mettre en commun de la manière la plus efficace possible les fonds des pays de l'Alliance en vue de bâtir les infrastructures nécessaires à la défense collective. Cependant, étant donné les bouleversements survenus dans le contexte de la sécurité européenne, le fait que le redressement économique de l'Europe de l'Ouest est aujourd'hui achevé, et devant la nécessité de répondre aux besoins de sécurité collective en Europe centrale et orientale, le Canada réduira sa contribution à ce programme en vue de consacrer une partie des sommes ainsi dégagées au financement de contacts bilatéraux élargis avec ces pays, dans le cadre du Programme d'aide à l'instruction militaire.
Continuité vis-à-vis de la CSCE.
Le Canada joue un rôle actif au sein de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) depuis sa création en 1973. Nous avons, entre autres, signé le document initial (l'Acte final d'Helsinki de 1975), le Document de Stockholm de 1986 sur les mesures d'instauration de la confiance, le Traité sur les forces conventionnelles en Europe de 1990, ainsi que les Accords de Vienne de 1990 et de 1992. Le Canada a par ailleurs affecté des forces à la Mission de surveillance de la Communauté européenne dans les Balkans (initiative de la CSCE) et a fourni un soutien opérationnel à la mission de la CSCE dans le Haut-Karabakh.
Parmi les organisations qui traitent des questions de sécurité régionale en Europe, la CSCE est la seule qui englobe la Russie ainsi que la quasi-totalité des autres pays d'Europe centrale et orientale. Elle joue de ce fait un rôle particulier dans l'instauration de la confiance entre ses membres. Il est également possible que cette organisation, qui a tant contribué à la prévention des conflits, puisse à l'avenir intervenir dans leur règlement - rôle qui pourrait englober divers types de missions de maintien de la paix et opérations connexes. Dans la mesure où un consensus pourrait s'établir sur ces fonctions, le Canada serait prêt à participer à de telles activités dans les limites imposées par ses contraintes budgétaires et dans la mesure de ses moyens.
Il convient néanmoins de souligner que la CSCE ne dispose pas de mécanisme décisionnel véritable. En effet, malgré les mesures prises récemment pour améliorer son appareil administratif, la CSCE reste bien plus un processus qu'une institution. Pourtant, à long terme, la CSCE pourrait bien apporter une contribution précieuse à la sécurité européenne, dans la mesure où elle encourage la transparence entre ses membres et entre les organisations régionales (l'OTAN et l'Union de l'Europe occidentale (UEO), par exemple) et du fait du code de conduite paneuropéen qu'elle élabore petit à petit. Le Canada continuera donc de participer activement à ce forum.
Ouverture sur la région Asie-Pacifique.
Dans la région Asie-Pacifique, en matière de sécurité, hormis sa participation à la guerre de Corée, le Canada a limité son rôle, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, à diverses missions de maintien de la paix et d'observation (dont la Commission internationale pour la surveillance et le contrôle au Viêt-nam et l'Autorité provisoire des Nations unies au Cambodge) et aux exercices aériens et maritimes RIMPAC tenus avec les États-Unis, le Japon, l'Australie et, parfois, quelques autres riverains du Pacifique. À mesure que ses intérêts en Asie se sont accrus au cours des dernières années, le Canada a intensifié ses activités par le biais de diverses initiatives en matière de sécurité régionale, notamment en favorisant l'ouverture d'un dialogue sur ces questions au sein, par exemple, du Forum régional asiatique, du Conseil de coopération en matière de sécurité dans la région Asie-Pacifique et du Consortium canadien sur la sécurité de la région Asie-Pacifique. Toutes ces activités se poursuivront et, comme dans le domaine économique, le Canada prendra une part plus active au plan de la sécurité dans la région.
À cette fin, nous élargirons notre programme de contacts militaires bilatéraux avec divers pays d'Asie, dont le Japon, la Corée du Sud et les membres de l'Association des nations du Sud-Est asiatique (ANSEA). À l'heure actuelle, ces contacts se limitent à l'envoi d'attachés militaires dans certaines capitales et à la tenue de pourparlers et de conférences périodiques au niveau des états-majors. Ces activités seront progressivement complétées par un programme plus régulier de visites et d'échanges sur les questions de maintien de la paix, y compris dans le cadre des programmes du Centre international canadien Lester B. Pearson.
Dans les autres régions.
Depuis 1947, outre sa participation à la guerre du Golfe, le Canada a pris part à plus de trente missions de maintien de la paix, d'observation et de secours humanitaires en Amérique latine, au Moyen-Orient et en Afrique. Il maintiendra son engagement vis-à-vis de la stabilité de ces régions, par l'entremise de l'ONU et, s'il y a lieu, d'organismes régionaux. Le gouvernement accordera une importance accrue au volet latino-américain de sa politique de sécurité dans le cadre d'entreprises bilatérales et de l'Organisation des États américains. Nous offrirons en outre notre assistance aux pays d'Amérique latine dans des domaines comme la formation au maintien de la paix, l'élaboration de mesures de confiance et les rapports entre civils et militaires. En Afrique, le Canada cherchera essentiellement à développer la capacité des pays de ce continent àentreprendre des missions de maintien de la paix, par le biais de contacts bilatéraux et des programmes de formation du Centre international canadien Lester B. Pearson.
Objectifs
Le gouvernement procède actuellement au renouvellement des bases de l'engagement traditionnel du Canada en matière de sécurité internationale. Le Canada continuera de participer activement à l'ONU et à l'OTAN, mais il veillera à ce que ces institutions soient réformées, afin qu'elles puissent devenir des organismes plus rapides à l'action, plus pertinents, mieux adaptés et plus efficaces. Il poursuivra par ailleurs son action au sein de la CSCE et, dans les limites des ressources disponibles, tentera d'approfondir ses relations militaires avec l'Europe centrale et orientale, l'Amérique latine, la région Asie-Pacifique et l'Afrique.
Par suite de l'expansion spectaculaire qu'ont prise les opérations de l'ONU, tant du point de vue de leur nombre que de leur portée, le Canada se trouve aujourd'hui confronté à des choix difficiles. Notre situation financière nous forcera à être plus sélectifs dans nos engagements. D'autre part, il faudra que les Canadiens acceptent le fait que certaines missions présentent des risques considérables. En optant pour une force polyvalente et apte au combat, néanmoins, le Canada restera en mesure d'apporter une contribution véritable et utile à la paix et à la sécurité internationales, aussi bien dans le cadre de l'ONU que de l'OTAN ou d'éventuelles coalitions de pays partageant les mêmes points de vue.
Les Forces canadiennes auront plus particulièrement pour mission:
- de prêter leur concours au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international afin de lui permettre de protéger les ressortissants canadiens se trouvant dans des régions menacées par un conflit imminent et, au besoin, de les évacuer;
- de prendre part à des opérations multilatérales, sous les auspices de l'ONU, partout dans le monde, ou en vue de défendre des États membres de l'OTAN et, pour ce faire, les Forces devront:
- être en mesure de déployer (ou de redéployer à partir d'autres théâtres d'opérations multilatérales) un quartier général de forces opérationnelles interarmées, ainsi que, séparément ou ensemble, un ou plusieurs des éléments suivants:
- un groupe opérationnel naval composé d'un maximum de quatre combattants (destroyers, frégates ou sous-marins) et d'un navire de soutien, et doté d'un appui aéronaval approprié;
- trois groupements tactiques distincts ou un groupe-brigade (formé de trois bataillons d'infanterie, d'un régiment blindé et d'un régiment d'artillerie, et doté de l'appui au combat et du soutien logistique appropriés);
- une escadre de chasseurs avec soutien approprié;
- un escadron d'aéronefs de transport tactique;
- pouvoir fournir:
- dans un délai de trois semaines, des éléments individuels ou les éléments d'avant-garde de cette force et les soutenir aussi longtemps que cela est nécessaire dans un contexte de menace réduite;
- dans un délai de trois mois, le reste des éléments de la force d'intervention;
- affecter:
- un groupe bataillon d'infanterie soit en réserve de l'ONU, soit au service de la force de réaction immédiate de l'OTAN;
- et disposer de plans de mise en oeuvre de mesures visant à accroître la capacité des Forces canadiennes de tenir leurs engagements existants ou de faire face à une crise grave;
- de remplir par ailleurs, en temps de paix, certains engagements particuliers à l'égard de l'OTAN par affectation:
- d'un navire à la Force navale permanente dans l'Atlantique;
- d'un navire (de manière intermittente) à la Force navale permanente en Méditerranée;
- d'équipages et d'autres militaires au système aéroporté de détection lointaine;
- d'environ 200 militaires à divers quartiers généraux;
- de crédits réduits au Programme d'infrastructure; et
- d'installations diverses à l'entraînement des forces alliées au Canada, moyennant recouvrement des coûts;
- compte tenu des nouvelles priorités géographiques, d'élargir les contacts et échanges bilatéraux et multilatéraux avec certains de nos partenaires d'Europe centrale et orientale, de la région Asie-Pacifique, d'Amérique latine et d'Afrique, et de les axer plus particulièrement sur le maintien de la paix, les mesures de confiance et les rapports entre civils et militaires; et
- de faire leur part en matière de vérification des accords de contrôle des armements en vigueur et de participer à l'élaboration de nouveaux accords.